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Céline Boubekri, Amsterdam Worldwide (French Touch)


  • Céline, vous êtes française et vous travaillez maintenant à Amsterdam Worldwide, à Amsterdam (ça ne s’invente pas). Est-ce que vous pouvez brièvement nous décrire votre parcours ?

J’ai fait mes études à Paris en école de commerce, puis j’ai tout de suite commencé à travailler côté client pour gérer la communication externe d’un groupe de transport français durant quatre années. Ensuite, avec cette même entreprise, je suis partie en mission expatriée pendant 1 an à Santiago du Chili pour déployer la marque sur la région Amérique Latine. Une expérience extraordinaire dont je garde un souvenir inoubliable notamment sur le plan culturel. Après avoir collaboré avec plusieurs agences côté client, j’avais toujours eu la curiosité et l’envie de passer de “l’autre côté”, celui du monde de l’agence. Je trouvais aussi que cela correspondait bien plus à ce que j’aimais, c’est à dire être plus proche de la création et à ma personnalité, finalement très peu corpo. J’ai donc fait le saut en agence chez Sid Lee à Montréal. Pendant presque deux ans, j’ai travaillé au service conseil et c’est là que j’ai attrapé le virus agence ! Puis, après autant de temps passé à l’autre bout du monde, j’ai décidé de rentrer en Europe et de m’installer à Amsterdam. Je suis maintenant en senior account manager chez Amsterdam Worldwide et j’ai la chance de pouvoir gérer plusieurs comptes dans des domaines complètement différents (fashion, finances, automobile, start-ups…). 

 

 

  • Amsterdam est probablement le hub européen le plus international. Comment votre expérience vous aide-t-elle ?

Mon expérience très internationale m’aide tous les jours que ce soit en interne ou en relation client. En effet, mes collègues à Amsterdam Worldwide viennent de partout, ils sont italien, espagnol, canadien, allemand, bulgare, sud-africain…Avec des clients principalement au Japon, en Allemagne et parfois néerlandais. Bref, ça fait beaucoup de différences culturelles à orchestrer en même temps, ce n’est pas toujours facile mais toujours très enrichissant. Je dois et continue d’apprendre les us et coutumes de chacun. Mon expérience m’aide à prendre du recul, à ne jamais tomber dans les clichés et aussi garder une certaine autodérision sur la culture française. 

  • Quelle est la campagne dont vous êtes la plus fière ?

J’aimerais en citer deux car j’aurai beaucoup de mal à choisir.
Par ordre chronologique, la première est une campagne de sensibilisation pour Fillactive, une association canadienne qui incite les jeunes filles à retrouver leur goût pour le sport. À l’âge de la puberté, peu à l’aise avec les changements du corps, la plupart d’entre elles abandonnent le sport.
Avec Sid Lee, nous avions raconté une histoire d’amour entre l’adolescente et le sport, parfois déchirante mais toujours bénéfique. Je suis assez fière de cette campagne car elle porte un vrai message autour des valeurs du sport et de la construction de la femme à l’adolescence, de sa confiance et du regard qu’elle porte envers elle-même.
Puis, la deuxième s’appelle Dead White Mens Clothes, c’est un projet artistique et mode, lancé l’an dernier en collaboration avec un artiste berlinois-ghanéen et Amsterdam Berlin (notre antenne à Berlin).

DEAD WHITE MENS CLOTHES 18–19 001–118 from Amsterdam Berlin on Vimeo.

L’origine du nom très provocateur de la marque DWMC part d’une légende populaire au Ghana. Lorsque la première vague de vêtements de seconde main est arrivée au Ghana depuis les pays occidentaux, les habitants avaient dû mal à croire que des vêtements d’aussi bonne qualité soient donnés. Pour eux, ils devaient surement appartenir à des hommes blancs maintenant décédés. Nous avons donc développé une collection à partir de ces vêtements donnés et ensuite revendus sur le marché au Ghana. Avec un positionnement de marque de luxe, nous avons lancé toute une campagne de notoriété accompagné d’un film, de la création d’un e-shop et du lancement officiel de la marque à Paris lors de la Fashion Week en septembre 2018. C’est un beau projet qui nous invite à nous questionner sur notre manière de consommer la mode et sur la vraie valeur du luxe. 

  • Quelle est la campagne française qui vous a le plus marqué ?

Sans hésiter, je citerai Timeless, Lacoste par BETC, c’est la campagne qui m’a le plus marquée. C’est celle qui représente pour moi une sorte d’art publicitaire pouvant se rapprocher de celui du cinéma, capable de retranscrire une certaine émotion et esthétique visuelle dans un condensé d’1:30 min. Pour moi, elle fait aussi référence à la French Touch qui s’exporte très bien à l’international, celle du romantisme à la française, celui qui nous fait vibrer et nous inspire. C’est un très beau film de marque dont la signature dévoilée à la fin « Life is a beautiful sport » prend tout son sens. 

  • Quelle est l’habitude professionnelle, typiquement française qui vous semble la plus difficile à faire passer ici ?

Au Canada et au Chili, il était très difficile de faire passer l’esprit critique, pas forcément apprécié ou parfois perçu de manière négative.
Donner son avis est quelque chose encrée dans la culture française. J’aurais beaucoup de mal à me défaire de ça.
Pour moi, il est important de pouvoir échanger de manière spontanée sur un sujet même si l’idée n’est pas 100% aboutie. Ce n’est pas quelque chose de toujours évident dans les autres cultures. En France, nous parlons énormément, faisons beaucoup de réunions, nous appelons beaucoup que ce soit en interne ou avec les clients. D’autres pays n’en voient pas forcément l’utilité. 

  • Et si vous reveniez en France, quelle pratique publicitaire professionnelle souhaiteriez-vous ramener et instaurer ?

Aller davantage droit au but, que ce soit dans la manière de présenter au client ou de travailler les messages de communication. J’ai l’impression que nous manquons parfois en France de simplicité. Nous avons appris à développer encore et toujours notre pensée, mais parfois il est important de rendre les choses plus concrètes et plus directes pour que le message fonctionne.
Je rajouterai aussi le fait de travailler plus proche avec les créatifs, j’ai l’impression que cette séparation entre le service commercial et la création perdure toujours en France. Par exemple, à Amsterdam Worldwide, le processus créatif est beaucoup plus inclusif et participatif. J’apprécie de pouvoir brainstormer avec les créatifs sur des concepts, comme de leur demander leur avis sur des enjeux de marque afin de conseiller au mieux les clients. C’est la vision de l’agence que je partage et que j’aimerais retransmettre si un jour je souhaite rentrer en France. 


Céline Boubekri
Head of Client Services Hey Honey
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